Sacs Hermès : des faussaires de haut vol au tribunal

24 juin 2020 | Presse

Ce mercredi s’ouvre à Paris le procès d’une minutieuse filière de contrefaçon de sacs Hermès. Elle était composée d’une dizaine de salariés ou ex-salariés du célèbre maroquinier.

Par

Nicolas Jacquard

En matière de sacs Hermès, une filière de contrefaçon peut en cacher une autre. En décembre dernier, nous révélions les agissements d’une quinzaine d’ex-salariés du célèbre sellier, reconvertis dans la fabrication de vrais-faux sacs « Birkin », le must de la marque de luxe française. Interpellés en 2012, ils n’ont pas encore été jugés.

En revanche, neuf autres personnes vont l’être ce mercredi. Là encore, la majorité exerçaient comme maroquiniers, artisans coupeurs ou assembleurs pour Hermès. Avant de se lancer en solo sur leur temps libre, forts de leur savoir-faire. Au terme d’une instruction ouverte en 2012 à Paris, les enquêteurs ont mis au jour « un réseau structuré ». Il aurait écoulé, entre 2011 et 2014, environs 150 sacs pour un chiffre d’affaires de plus de quatre millions d’euros.

Chaque sac était ainsi vendu entre 23000 et 32000 euros. Le « Birkin » est en effet le modèle phare de la marque. Produit à seulement 8000 exemplaires par an, il est particulièrement prisé dans sa version « crocodile », également privilégiée par ces faussaires.

Pour les magistrats, trois « associés » étaient à la manœuvre. Via de multiples écoutes téléphoniques, les enquêteurs ont d’abord distingué une masse de surnoms : « le Viet », « le petit », « la grosse » ou « la piscine ».

Le Viet, c’est Pierre B. Ciblé par un mandat d’arrêt, cet ancien habitant du Perreux-sur-Marne (Val-de-Marne) se trouve d’ailleurs toujours au Viêt Nam, son pays de cœur. Il ne sera pas présent en raison de l’impossibilité à voyager liée à la crise du Covid. Il était « le coupeur » du réseau, fabriquant 25 à 30 sacs.

La tête du réseau empoche 150000 euros

A ses côtés, Jean-Pierre DC, également ancien salarié d’Hermès, comme sa compagne, pilotait la finition, toute aussi essentielle. Près de 19000 euros en liquide ont été trouvés au domicile du couple en perquisition. Surtout, il est apparu que Jean-Pierre, maroquinier rentré chez Hermès en 1993, avait fait sortir de la documentation confidentielle permettant la conception des sacs.

D’autres complices étaient parvenus à subtiliser des outils spécifiques, par exemple les poinçons permettant de marquer les sacs d’une lettre renseignant leur année de production.

A la tête du réseau, c’est Sandrine E. qui semblait régenter son monde. Personnage haut en couleur, cette mère de famille résidant à Ivry-sur-Seine faisait preuve d’un indéniable autoritarisme envers ses « subordonnés », lesquels ne cessaient, sur les écoutes, de dénoncer son management. Au terme de l’enquête, il est apparu qu’elle avait été « la grande bénéficiaire » de cette filière, avec près de 150000 euros empochés, ce qui ne l’empêchait pas de pointer à Pôle emploi.

« Hermès ne nous dit pas en quoi son sac Birkin est un modèle original »

Enfin, la filière n’aurait pas été complète sans la présence de Christian G. Ancien directeur de Louisiane, la filiale peaux d’Hermès, cet Italien en avait été licencié après avoir été mis en cause dans la première filière, qu’il approvisionnait déjà en matières premières. On découvre avec ce nouveau dossier qu’il avait repris du service, pour le compte d’une nouvelle société italienne, et fournissait là encore ce second réseau de contrefaçon. Dans les deux cas, Christian G. a échappé à une mise en examen.

Avant même de plonger au cœur de la filière, le tribunal sera confronté ce mercredi à une demande de renvoi. Me Alexandre Lazarègue, avocat de Pierre B., entend ainsi interroger les fondements mêmes de la notion de contrefaçon. « Hermès ne nous dit pas en quoi son sac Birkin est un modèle original, pointe l’avocat. Et pour cause : il ne l’est pas. Même les historiens ont noté qu’il s’inspirait des sacoches en cuir des cavaliers argentins. »

Par

Nicolas Jacquard

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